Courir perchée sur nos escarpins d’un rendez-vous à un autre tout en pianotant un message et en réfléchissant au mail à répondre à notre chef, est un sport féminin. Ce n’est pas Anna, l’héroïne d’Olivia de Lamberterie qui dira le contraire. Car, comment font les gens pour gérer vie personnelle et professionnelle quand les journées durent 24h ? Comment font les gens pour garder le sourire malgré les informations anxiogènes ? Comment font les gens pour vivre en général ?
Anna, quinquagénaire, est au bord du rouleau. Elle court dans tous les sens. Elle se cogne aux murs. Elle doute beaucoup pour tout et pas grand-chose. Elle encaisse les coups de la vie avec le sourire et parfois en laissant couler quelques larmes. Elle a la qualité de savoir rire de tout et surtout d’elle-même en compagnie de ses trois meilleures amies.
Anna vit avec son téléphone portable greffé. Ce téléphone qui lui envoie les notifications du monde qui va mal, qui laisse passer les appels de sa nouvelle cheffe tyrannique qui a comme obsession les chiffres et les auteurs bankable, qui transmet les mots d’amour et d’excuse de son mari, les « Maman, j’ai quelque chose à te dire… », « Maman, help… », « Maman, tu ne vas pas être contente mais… » de ses trois filles.
Anna est une femme à la vie normale en opposition à ses mamans parfaites. Une maman qui certes, sort le plat picard plusieurs fois par semaine et fait l’impasse sur les légumes anciens mais est prête à oublier sa soirée pour un exposé à rendre pour le lendemain, qui ferme les yeux sur ses pulls et son maquillage qui disparaissent, qui s’oublie souvent pour ceux qu’elle aime.
Ce roman est beau mais pas parfait. Il y a des longueurs, trop de flash-backs, on se perd dans le méandre et le tumulte de la vie effrénée de cette femme. Il y a beaucoup de l’auteure dans ce roman aussi bien dans ses expressions, les intonations de ses phrases et des parallèles avec sa vie. Mais ne met-on pas un peu de soi dans ses écrits ?
Il me restera de cette jolie lecture, une écriture maîtrisée, de la douceur de cette femme qui est un peu nous toutes quel que soit notre âge et surtout de nombreux éclats de rire (Pardon à mes voisins de train!).
Les passages du livre qui m’ont touché :
« L’amour ne suffit pas », serinent les pédiatres à longueur d’émissions, il faut être psy, prof, flic et nutritionniste pour élever un enfant, la maternité est devenue une profession à haut risque. Mère positive ou mère indigne, choisis ton camp camarade. »
« Travailler sur un bureau prémoulé de maison Playmobil, séparé de son voisin par une vitre transparente en plastique, Anna ne voit pas très bien qui pourrait en rêver la nuit, mais elle se tait en femme soumise du vingtième siècle. »
« Elle court dans le couloir du métro, elle est en retard, vacille sur ses talons hauts, dépasser de dix centimètres les gens qui l’impressionnent lui donne l’illusion d’un coup d’avance, elle n’est pas encore à l’âge certain où l’on choisit des chaussures parce qu’elles sont confortables. Elle est toujours en retard, parfois elle se demande si son inconscient ne lui dicte pas d’oublier son sac ou son masque afin qu’elle s’inquiète du temps à rattraper plutôt que du rendez-vous. »
Et vous, quel passage vous a parlé ?
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