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"Furies" de Julie Ruocco aux éditions Actes Sud



Il y a Bérénice, qui tient son nom d’une pièce de Racine, jeune archéologue qui déterre des trésors et surtout substitue des œuvres d’art en Moyen-Orient pour les rapporter en toute illégalité en France. Alors qu’elle est en Turquie pour récupérer des bijoux, elle échappe à une explosion et le destin place sur sa route une petite fille.


Il y a Asim, ancien pompier syrien que la guerre et le décès de sa sœur a anéanti. Il est devenu faussaire en Turquie. Il crée des passeports à partir des noms des disparus.


Il y a le fantôme de Taym, la sœur d’Asim qui a laissé son arme pour vaincre la furie des hommes : une clé USB contenant des images et des textes sur le massacre des populations.


Il y a leur rencontre autour d’un faux passeport.


Et il y a surtout ce roman bluffant, criant de vérité et de réalité et s’inspirant de la mythologie.


Exilée et recherchée à la frontière Turque, Bérénice a besoin de l’aide d’Asim pour obtenir un faux passeport pour emmener avec elle, la petite fille qu’elle a recueillie. En échange de ce service, Asim lui confie la clé USB de sa sœur. Bérénice découvre une multitude de documents et photos inculpant les responsables du massacre des populations syriennes.


Tous les trois, ils fuient pour trouver refuge dans la province de Rojava où les habitant et notamment les femmes se battent pour la liberté. Ces femmes n’ont pas peur de risquer leur vie. Elles condamnent les européens venus répandre le mal. A leur échelle, Bérénice et Asim vont participer à ces combats.


Dans son premier roman, Julie Ruocco raconté avec beaucoup de précision et des mots forts, la guerre en Syrie avec ses massacres et ses combats et en même temps l’entraide, l’humanité et les batailles des populations contre l’obscurantisme.


Le titre « Furies » fait référence au pendentif que porte Bérénice pendant tout le récit et qui représente la gravure d’une furie, divinité romaine et nom donné aux Erinyes grecques. « Furies » pour rendre hommage aux femmes qui se battent pour la liberté de leur pays et pour que la justice soit rendue afin d’éviter les vengeances inutiles.


Une histoire réaliste et très précise à travers laquelle la mythologie et l’actualité s’entremêlent. Une écriture maîtrisée et puissante. Un récit impressionnant par l’écriture et la maîtrise du sujet.


Merci aux 68 Premières fois pour la découverte de ce premier roman magistral.


Les passages du livre qui m’ont touché :


« Il n’y a que l’art pour sauver les hommes, l’art pour leur laver la langue et les yeux. »


« Jim, jiyan, azadi. (…) « Femme, vie, liberté ». C’est notre devise. »


« Toutes ces années passées à collectionner sans comprendre, à toucher sans voir. Elle s’est jetée sur des cailloux polis pour tromper sa soif d’histoire et l’histoire l’avait attrapée. Un jour, un prof leur avait lu un texte, quelque chose écrit par Frantz Fanon. C’était bête que ça lui revienne seulement maintenant : « Chaque génération doit, dans une relative opacité, affronter sa mission : la remplir ou la trahir ». Bérénice n’avait ni honoré ni trahi. Qu’elle accouche les entrailles du sable ou la voix des survivants dans le noir, au fond d’un garage, sa mission avait toujours été celle de rendre à la lumière, de déplacer. Elle ne pouvait ni remplir ni trahir, seulement voler. »


« Elle y avait rencontré des âmes clairvoyantes, sans consolation mais fortes de toute leur espérance. Ces habitants ne demandaient pas au monde de les rassurer, juste d’être libres. »


« L’histoire n’est qu’une ronde de Furies aux ailes entrelacées et chacune de leurs plumes peut guérir les nations. »


Et vous, quel passage vous a parlé ?

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