
Aidan a grandi dans un petit village Irlandais. De cette île entourée par la mer, il a passé son enfance à lui tourner le dos et à la contourner pour ne jamais la regarder en face. La mer lui a enlevé ses parents, il la tient pour responsable de son statut d’orphelin.
Un tableau va pourtant le bouleverser. De ces grandes vagues peintes, de ce bateau pris par les flots, de cet œuvre de Turner, « Le naufrage », son histoire va ressurgir en lui. Il se décide alors à repartir sur les lieux du drame.
Arrivé dans ce petit village de Bretagne, Aidan veut démêler les fils de son passé et connaître la vérité autour du drame qui a coûté la vie à ses parents.
Il pensait passer inaperçu, personne n’a oublié cette nuit. Assis à cette table en formica du café de la place, tout le monde chuchote dans son dos. Personne ne veut replonger dans ce passé si douloureux. Chaque habitant a joué un rôle lors de cette nuit. Chaque habitant a été marqué par cet accident. Chaque habitant porte le poids de la culpabilité.
Aidan, d’abord pressé, laisse finalement le temps aux hommes de ce village. Il les laisse s’approcher de lui, lui apporter leur confiance et leur amitié. Aidan a finalement du temps grâce à sa rencontre avec la mystérieuse Manon. Elle aussi, a fui une partie de son histoire. Elle aussi, ne se sent pas à sa place dans cette société qui néglige la nature et ne sait plus communiquer.
Elle, l’artiste et l’amoureuse de la mer, va apprivoiser le cœur d’Aidan et aussi sa peur des eaux.
Avec Manon, à ses côtés, Aidan va oser regarder la mer en face, s’y plonger, l’apprivoiser par le corps et même naviguer sur ses eaux.
Lui qui se pensait seul et différent, va trouver deux alliées pour soigner ses blessures et oser s’ouvrir à la vie : Manon et la mer.
Un roman d’une très grande beauté qui coupe le souffle. Des descriptions magnifiques des eaux, du ciel et de la mer qui s’entrecroisent, des plages, des mers calmes et des plus tempétueuses.
Une balade empreinte de poésie et d’amour entre les flots.
Un appel à prendre le large pour quelques heures.
Un coup de cœur.
Les passages du livre qui m’ont touché :
« Sans doute parce que l’art parle à l’âme plus qu’à l’intelligence. »
« J’aime ces heures de bar où il suffit d’avancer le bras pour toucher le destin des autres. Les culs de verre sont une excellente loupe pour lire l’âme humaine. Poings serrés, mains molles, doigts tremblants, assurance, colère, désarroi ou ennui, la vie s’écrit sur les tables en Formica. »
« L’écrivain ouvrait un territoire à ceux qui sont en délicatesse avec la réalité. Il y avait un pays pour nous. »
« La mer est sa part pure, son versant lumineux, sa protection suprême. Finalement, naviguer est sa manière d’entrer en rébellion. En allant sur l’eau, elle prend le maquis. »
« Elle assemble les instants de vie comme les fragments de verre de ses vitraux chatoyants. En puisant autant dans le réel que dans l’imaginaire. »
« Ses mains racontent ce que l’homme tait. Les crevasses et les cals disent les nuits en mer, les tours de manivelle, le sel, l’effort, les jours ventés et les nuits laborieuses. Un cuir vivant. »
« Elle aime le temps qui prend son temps. Et me montre que l’intensité peut résider dans la perception des choses autant que dans l’action. »
« Le rivage offre son épaule sablonneuse mais nous restons en lisière, à portée de la vie tout en le tenant en respect. De terre, les sons nous parviennent filtrés, comme triés par une sélection naturelle. Etre sur l’eau mais entouré du parfum des herbes et des buissons chauffés tout le jour par le soleil. Un mouillage forain. Ce terme distille un air de nomade liberté. »
« La mer est l’épanchement du rêve dans la vie réelle et les rêves ouvrent des portes, même si on ne les franchit pas. »
« J’ai compris que la confiance en soi ne se décrète pas. Elle reste un slogan vide si l’on n’use pas de sa liberté. Faire des choix, prendre des décisions, maîtriser sa pente facile. L’essence même de la vie au large. »
« Au large, on cesse vite de se croire au centre de la scène puisqu’il n’y a plus de spectateurs. Le grand théâtre est vide. Le monde a moins d’emprise sur ceux qui vont en mer. »
Et vous, quel passage vous a parlé ?
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