Paris 1960, Simeon, afro-américain de 30 ans, vient d’arriver dans la capitale. Il a quitté sa ville natale Philadelphie et un travail de journaliste bien payé pour fuir le racisme de son pays envers les personnes de couleurs et ainsi l’ambiance électrique qui règne dans les rues américaines où pour une tête qui ne revient pas, la police arrête sans raison, pour un quartier traversé, un groupe use de leur violence sur une personne seule.
A Paris, il respire enfin et se sent à nouveau libre de se balader dans n’importe quel quartier à toute heure de la journée. Dans les cafés parisiens, il retrouve ses compatriotes et notamment Babe, un afro-américain qui tient une librairie et qui l’initie à la vie parisienne et ainsi lui permet de faire la connaissance de Maria, une réfugiée polonaise qui rêve de devenir comédienne et qui va très vite partager sa vie.
Simeon découvre la culture française, les clubs où on danse jusqu’à l’aube et les soirées à refaire le monde. Il rencontre aussi, Ahmed et Hossein. Avec eux, il côtoie les quartiers où les ouvriers Algériens venus travailler en France, sont pris pour cibles et vivent dans des conditions d’extrême pauvreté, n’ayant pas accès à un logement décent et à certains lieux comme les cafés ou les clubs et subissent discriminations raciales et violences policières.
Toutes ses illusions s’effondrent. Dans le Paris des années 60, le racisme existe aussi. De ce côté de l’Atlantique, ce ne sont pas les personnes de couleurs, les cibles des injures, des violences et des contrôles identités, mais les Algériens. En France, Siméon est peut-être considéré comme un « homme blanc », mais il est déçu de ce pays qu’il admirait. D’abord observateur, il se sent très vite impuissant face à la violence que connaissent ses amis.
Les événements tragiques du 17 octobre 1961 vont réveiller les souvenirs que Simeon tentait d’enfouir en venant en France. Les différents visages qu’ont pris la violence dans son pays vont venir à nouveau lui faire face et cette fois-ci Simeon ne baissera pas les yeux.
Un roman historique écrit avec beaucoup de réalisme et de sincérité. Un roman qui permet de ne pas oublier les faits du passé beaucoup moins glorieux pour la France.
Il y a des flash-backs dans ce récit où l’auteur fait un parallèle entre les humiliations et les violences commises contre les afro-américains aux Etats-Unis et contre les Algériens en France.
William Gardner Smith a écrit ce roman en 1963 et il est traduit pour la première fois. On retrouve dans ce récit des moments autobiographiques de l’auteur qui a vécu en France à cette période et qui était présent au moment des événements de la guerre d’Algérie. William Gardner Smith a quitté les Etats-Unis pour Paris où il a travaillé pour l’AFP en tant que correspondant dans plusieurs pays africains.
Un récit engagé, une lecture coup de poing avec des passages forts.
Ce livre est une lecture passionnante qui retrace une partie historique souvent occultée. Un roman qui fait réfléchir et qui instruit. Un récit qui permet le devoir de mémoire.
Je remercie les éditions Christian Bourgeois Editeur pour l’envoi de ce roman et à Babelio pour l’organisation de la Masse Critique Littératures de septembre, qui m’a permis de découvrir ce roman majestueux et bouleversant.
Les passages du livre qui m’ont touché :
« - Ca veut dire quoi vivre pour toi ?
- M’amuser. Ne pas m’inquiéter. Faire toutes les choses que j’ai envie de faire – rire, chanter, danser, voir des lumières éclatantes. Les paillettes, je veux les paillettes de la vie pour une fois, tu comprends?»
« C’est toujours un accident historique au début. »
« Il adorait vraiment Paris. Il aimait les plaisirs simples – ainsi, passer une nuit blanche, puis à l’aube descendre au Vert-Galant, cette pointe de verdure sur l’île de la Cité qui saillait dans la Seine, et adresser des signes de la main aux pilotes des péniches.
Il aimait les visages des Français ordinaires – pas les boutiquiers, ni les politiciens, ni les intellectuels, ni les fonctionnaires, ni les policiers, mais les chauffeurs de bus, les cantonniers, les vendeurs de journaux, les forts des Halles, les employés des chemins de fer, les poseurs de briques, les charpentiers et les ouvriers. Il lisait dans leurs yeux des souvenirs brouillés de la Révolution, de la Commune, de la Résistance. Ces événements n’étaient pas oubliés, ils continuaient de vivre chez ces Français et, à travers eux, chez Simeon. »
Et vous, quel passage vous a parlé ?
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