Des roses proposées aux abords des bouches de métro, en terrasse le soir ou dans quelques restaurants où les tables de deux sont plus nombreuses.
La rose, fleur aux multiples symboles. La rose, fleur privilégiée pour déclarer son amour.
La rose, fleur qui lie le destin de Nana, Jan et Ali.
En Ethiopie, Nana a brillamment réussi ses études. Mais n’ayant pas trouvé de travail en ville, elle revient dans son village natal, auprès de sa mère. Là, elle se retrouve à travailler dans une serre qui cultive les roses. A 20 ans, son dos est courbé par ses branches à couper huit heures par jour, son corps est marqué par les pesticides qu’elle respire quotidiennement. Pour 35€ par mois, elle passe huit heures par jour à prendre soin des roses qui l’affaiblissent.
De la gare de l’Est où il partage une pièce avec sept autres réfugiés aux quartiers prisés de la capitale, Ali use ses baskets sur le bitume parisien. Chaque après-midi, il récupère son bouquet de quinze ou vingt roses selon les jours, puis part les vendre aux terrasses des cafés et restaurants parisiens. Il tend ses modestes roses aux groupes d’amis déjà bien avinés ou en touriste en voyage de noces. C’est une vingtaine d’euros ramassés chaque soir et donnés le lendemain à son fournisseur pour rembourser sa dette. Ce sont quelques euros gardés précieusement puis envoyés à sa famille restée au Bangladesh.
A Amsterdam, Jan subit sa vie. De l’extérieur, il a tout : un appartement, une situation, un boulot stable. A l’intérieur, ce n’est que tristesse et amertume. Le goût de vivre, il ne l’a plus et pour survivre, il se repose sur une routine. Tous les matins, aux aurores, il rejoint la salle des ventes. Et avec minutie et concentration, il doit appuyer sur un bouton avant ses concurrents et surtout quand le prix est bas.
Une rose et trois destins asservis.
A la lecture de ce roman, la rose apparaît différemment. On y ressent la dimension écologique, sociale et politique. Fleur consommée en occident, elle nécessite de nombreux produits chimiques qui abîment les sols, fragilisent la santé des hommes et femmes qui travaillent dans ces serres. La loi du marché régule son prix.
Un récit réaliste qui montre la rose sous un autre jour. Une plume juste et engagée.
Un livre de la rentrée littéraire à ne pas manquer.
Les passages du livre qui m’ont touché :
« Nana savait que cette chanson-là, c’était son âme qui la traînait. Il y avait en elle un soupçon d’angoisse répétitive – une musique qui, en tout point, reflétait les errances de ses pensées. »
« Et au milieu du trou colossal, l’eau verte, électrique et troublée. Un vert plus doux que les bambous, plus précis que celui des arbres. Le jaune des montagnes autour s’y reflète tout le jour et le soleil n’y peut rien – pour une fois, les couleurs n’ont rien à voir avec lui. »
« Elle ne ressassait pas inlassablement des angoisses, des griefs ou des hontes, non, elle avançait seule, comme les bons amis parviennent les soirs de grâce à mener une discussion qui non seulement les fait réfléchir, mais aussi les détourne sans bataille de leurs convictions précédentes. En ce sens, Nana, grâce à ses pensées, pouvait changer d’avis. »
Et vous, quel passage vous a parlé ?
Coucou Laura,
je voulais être au calme pour lire ton article car cet auteur m’est précieux… j’ai ce livre en numérique mais je me demande si je ne vais pas l’acheter tant je sens à tes mots combien je vais l’aimer ce livre. De lui, je te recommande son livre : Octobre où il décrit les méandres et abysses d’un homme rongé par la mélancolie. Un livre sublime qui m’a marquée à l’époque.