
D’abord, il y a les mots des autres transmis à ses élèves. Les mots des dramaturges, des romanciers étudiés, des poètes. Et puis, il y a eu la volonté de transmettre autrement, par l’imagination, par les textes inventés et écrits à la main. Des ateliers d’écritures pendant ses cours de français.
Les élèves se posaient devant leur feuille et laissaient libre court à leur imagination en fonction de la consigne, ou d’un début d’histoire ou encore de mots à insérer. Quelques contraintes mais surtout la liberté d’écrire, sans aucune pression, sans note, sans lecture à haute voix. Ecrire pour soi. S’accorder un moment à soi.
Puis, il y a eu ses propres écrits, ses ateliers d’écriture en tant qu’élève, ses premiers romans publiés. Être celle qui pose les mots, qui raconte des histoires, qui transmet des émotions à ses lecteurs.
Et un autre jour, quelques années plus tard, se retrouver à animer son propre atelier d’écriture. Avoir devant soi, un groupe d’écrivains en herbe passionnés, un autre groupe un peu obligé, des amateurs, des volontaires. Rencontrer des personnes aux vies différentes, aux attentes variées et les réunir autour des mots.
Inventer des bouts d’histoire, assembler des mots découpés, réécrire un texte. L’imagination est riche quand on joue avec l’écriture.
Dans cet essai passionnant et plein d’amour pour l’écriture, Jeanne Benameur revient sur les ateliers d’écriture qu’elle a animés et sur son lien avec les mots.
Elle conte des anecdotes des ateliers qu’elle a animé, des consignes qu’elle a imaginées, les rencontres qui l’ont marquée.
Au gré des pages, elle raconte aussi son amour pour l’écriture et le besoin de transmettre par les mots posés et par les histoires qui se tissent. Elle revient sur ce que lui apporte l’écriture : enracinement, moment à soi, silence et temps qui s’écoule autrement. Elle nous montre qu’importe la forme, les mots et les écrits servent de transmission et sont une force pour grandir et évoluer en société.
Des mots justes et empreints d’émotions pour parler d’une passion commune : l’écriture.
Les passages du livre qui m’ont touché :
« Transmettre quoi ? Mon goût pour la langue et la littérature ? Certes mais pas que. Quelque chose d’autre m’importe. Comment la pensée se pose, trouve enfin son assise paisible. Et comment alors on peut vivre sa relation avec le monde de façon libre, réfléchie. Forcément plus complexe et donc plus exigeante. Cette transmission a pour moi valeur politique. Une personne qui écrit vraiment, lit vraiment, est moins malléable. Elle a sa propre « densité ». Aujourd’hui plus que jamais il y a là pour moi une nécessité. »
« L’étymologie dit bien les choses. Il y a le préfixe « in » qui précède scribere, l’acte d’écrire. On écrit « dans » quand on inscrit. J’ai eu l’image d’un enracinement. Être bien planté dans le sol. L’inscription c’est ça, c’est un acte d’enracinement qui dit « je suis ici ». »
« Ecrire est un acte humble, silencieux. Mais qui exige de vrais choix et qui n’a pas peur de répéter, de recommencer. »
« Ecrire c’est aller au cœur des choses silencieusement. »
« Il faut beaucoup d’amour pour bien regarder. »
« Nous pouvons porter à l’intérieur de nous des images, des phrases, longtemps, sans même le savoir et lorsqu’elles s’écrivent, elles ont déjà fait tout un trajet intérieur qui les rend justes. Alors bien sûr, on n’y touche pas. »
« L’écriture a à voir avec le temps bien sûr. Un temps qui s’enroule à l’intérieur de nous, se déplie si nous le voulons bien, nous ouvre à des rives lointaines, sans bouger de chez nous. Nous revenons d’une plongée dans l’écriture avec un autre visage. »
Et vous, quel passage vous a parlé ?
Comments