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"Légende d'un dormeur éveillé" de Gaëlle Nohant



Dans son roman, « Légende d’un dormeur éveille », Gaëlle Nohant redonne vie au poète Robert Desnos. Du Montparnasse des années folles au Paris de l’Occupation, on suit les traces d’un poète plein de vie, généreux et libre. Entouré de ses amis, Jacques Prévert, Louis Aragon, Jean-Louis Barrault, Picasso ou encore Pablo Nerruda, pour ne citer que quelques-uns de ces nombreux compagnons de route, Robert Desnos a eu mille vies : écrivain, poète, critique de cinéma, chroniqueur radio, résistant de la première heure. Je ne connaissais que les poèmes de Robert Desnos, étudiés pendant mes études, j’ai découvert dans ce roman, un homme aimant la vie, ayant soif de liberté, d’art et d’amour.


Robert Desnos est un résistant dans l’âme et il déteste l’injustice. Dès 1927, il s’oppose à André Breton et se fait exclure du mouvement surréaliste. Quand la seconde guerre mondiale éclate, il n’hésite pas à rentrer dans la résistance et à se battre sans prendre en compte les risques. Robert Desnos n’a jamais abandonné ses passions et ses convictions. Il a toujours cru en ses rêves même quand il n’avait plus un sou. Il n’a jamais renié ses idées quitte à se brouiller avec ses amis, perdre un travail ou être menacé.


Gaëlle Nohant nous raconte la vie de Robert Desnos, non pas sous la forme d’une biographie linéaire mais de façon romancée en mélangeant l’histoire du poète avec l’Histoire. La période historique est la toile de fond du récit de la vie du poète.


On ressent la riche énergie et la vie tumultueuse du poète. Ambiance du Paris des années folles avec un monde artistique vibrant et qui mène une vie de bohème où la fête bat son plein tous les soirs et où l’alcool coule à flots.


D’une écriture très travaillée et bien documentée, l’auteure nous guide sur le chemin de Robert Desnos, de son atelier de la rue Blomet au bal de Montparnasse en passant par Belle-Ile et les terrasses de la Coupole. Des vers du poète viennent s’articuler dans le récit, j’en ai reconnu certains dont notamment le poème de La Fourmi appris en primaire et qui ne peut s’oublier : « Une fourmi de dix-huit mètres /Avec un chapeau sur la tête / Ca n'existe pas, ça n'existe pas / Une fourmi trainant un char / plein de pingouins et de canards / ça n'existe pas, ça n'existe / une fourmi parlant Français, Latin et Javanais / ça n'existe pas, ça n'existe pas / Eh ! pourquoi pas. », j’en ai découvert d’autres, comme ce poème paru en 1926 et clôturant le roman : « J’ai tellement rêvé fort de toi, / J’ai tellement marché, tellement parlé, / Tellement aimé ton ombre, / Qu’il ne me reste plus rien de toi. / Il me reste d’être l’ombre parmi les ombres / D’être cent fois plus l’ombre que l’ombre / D’être l’ombre qui viendra et reviendra dans ta vie ensoleillée. ».


La fin du roman est bouleversante et poignante, riche en émotion. Elle prend la forme du journal intime de Youki, le grand amour de Robert Desnos et sa muse. C’est Youki qui conclut ses magnifiques pages et la vie de Robert Desnos qui n’a pas survécu au camp de Theresienstadt. Dans ces pages, on ressent l’amour de Youki pour son poète, sa crainte de ne pas le revoir vivant. Elle nous raconte le besoin qu’elle a de s’entourer de leurs amis pour combler sa peine et continuer à faire vivre Robert Desnos.


Le roman est un hommage à l’amour, à l’amitié, à la révolte, à l’art et à la joie de vivre. Très beau portrait de ce poète, amoureux de la vie et de l’art. Un homme au grand cœur et aux fortes convictions, resté fidèle à lui-même qui jusqu’au bout se bat contre l’injustice et l’oppression des plus forts sur les plus faibles.


Dans cet hommage vibrant, on sent l’amour de l’auteure pour ce poète.



Les passages du livre qui m’ont touché :


« C’est un rêveur lucide, il rêve les yeux ouverts. »


« Un poème a plus de force qu’un discours, par l’émotion qu’il fait naître. »


« Sur ces pas, j’ai découvert que le rêve irrigue la vie et lui donne sa profondeur. Et que l’essentiel, c’est l’attention qu’on porte aux être et aux choses. »


« Robert non plus n’a jamais pu restreindre sa faim, se contenter de sa poésie. Il dessine et peint, compose des cantates et des livrets d’opéra, se confronte au théâtre, à la chanson, à la publicité et au cinéma. Mille et un projets tourbillonnent dans sa tête, engendrant un sentiment d’urgence et cette euphorie qui naît du travail fécond, des limites qu’on repousse ou qu’on escalade. »


« Mais qu’elle soit humble ou orgueilleuse, la poésie est fugitive. On laisse derrière soi un chemin que les ronces renfermeront tôt ou tard. »


« Je t’ai vu crever de faim sans y renoncer, endurer les boulots les plus ingrats pour le privilège de continuer à écrire ces vers qui ne t’attiraient ni gloire ni fortune, mais qui étaient comme des petits diamants scintillant dans la suie. »


Et vous, quel passage vous a parlé ?


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