« De notre monde emporté » de Christian Astolfi aux éditions Le Bruit du Monde
- quandleslivresnousparlent
- 18 août
- 2 min de lecture

Depuis l’enfance, sa structure, son pont impressionne Pierre, surnommé Narval par ses amis. Il en impose le site des Chantiers Navals de la Seyne-sur-Mer.
Pierre y entre à 20 ans comme son père avant lui. Il est formé sur le terrain par les anciens. Il se crée sa bande de copains. C’est le début des années 70, années florissantes pour les chantiers. On travaille, on rit, on partage des moments d’amitié. Ce sont aussi les premiers amours.
Arrive l’année 81 et sa vague d’espoir. Les travailleurs vont enfin récupérer le fruit de leur labeur, les conditions de travail vont s’améliorer. L’égalité va prendre place dans la société. Ce sont des années heureuses avant la déconvenue. Les promesses ne sont pas au rendez-vous, les chantiers vont mal.
Ce sont alors les premiers licenciements, les premières grèves, les longs mois d’arrêt des machines, les chèques promis. Il y a alors la colère, la fatigue, le sentiment d’abandon. Il faut penser à une autre histoire à écrire loin du chantier naval. Peut-être une page à tourner …
Surtout, il y a cette fibre, cette poussière blanche qui ressemble à de la farine. Les ouvriers se moquent gentiment de leur collègue recouvert de blanc à la fin de la journée. Eux aussi, ils la respirent dans la coque des bateaux. L’amiante. Gravité cachée par les pouvoirs publics et les patrons. La surveillance est de mise. Tous les six mois, une radio à passer et les mauvaises nouvelles qui affluent. La maladie est déjà là.
Leur corps meurtri par les années de labeur, leur tête meurtrie par ce sentiment d’injustice et désormais leurs poumons meurtris par l’amiante.
Commence alors un nouveau combat pour défendre les amis partis trop vite, les amis qui souffrent.
Avec sincérité et poésie, l’auteur retrace une chronique sociale. Un demi-siècle de la vie de ces hommes passionnés dont les enjeux économiques et politiques ont poussé à combattre. Une plongée dans le milieu des chantiers navals et de l’espérance et de la passion des hommes qui y travaillaient.
Une histoire passionnante et enrichissante.
Un coup de cœur.
Les passages du livre qui m’ont touché :
« C’est comme une de ces histoires dont on croit qu’elles n’auront jamais de fin, et que la grâce de leurs moments durera toute l’éternité. »
« Souvent je me perdais dans mes pensées, le stylo suspendu. Je voyageais avec elles. J’allais où elles me conduisaient. »
« Je parlais, le débit régulier, l’intonation maîtrisée, le souffle tenu. Sans pause. Je n’attendais de sa part aucune question, aucune relance. Je relatais le vécu. Le restituais à ma convenance. Le dramatisais, l’enjolivais, le déformais à ma guise. Je plantais le décor, les didascalies. (…) J’étais le scénariste, le metteur en scène, le monteur, le projectionniste. J’étais le narrateur, le témoin, le personnage principal. J’étais la voix off. »
Et vous, quel passage vous a parlé ?
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