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"Les lettres d'Esther", de Cécile Pivot



Nostalgique des échanges épistolaires qu’elle avait avec son père disparu, Esther, libraire dans le Nord de la France, écrit une annonce dans la presse « Apprenez à mettre en forme vos pensées, à raconter une histoire et à parler de vos émotions en vous inscrivant à atelier d’écriture consacré au genre épistolaire. Possibilité d’y participer quel que soit votre lieu de résidence. Du 4 février au 3 mai 2019.»


Cinq élèves de tout âge, de toute profession se joignent à elle et viennent former un groupe hétéroclite. Il y a Jean, le business man toujours dans un avion mais qui à fuir tout le temps, a perdu le sens de sa vie ; Jeanne, la doyenne du groupe, veuve et qui cherche dans ces échanges à sortir de sa solitude et à retrouver la chaleur humaine ; Nicolas et Juliette, en thérapie de couple, qui n’arrivent plus à se parler et vont tenter avec l’écriture de se comprendre à nouveau ; et enfin Samuel, adolescent perdu qui n’arrive pas à faire le deuil de son frère. Leurs contraintes : ils doivent choisir deux personnes avec qui échanger.


A travers leurs lettres, ces six personnages vont créer des liens et se mettre à nu dans leurs écrit car c'est souvent plus facile de s’ouvrir à des inconnus. Ce livre se présente comme un recueil d’échanges épistolaires, c’est très beau, très touchant.


En lisant ce livre, on prend une bouffée de tendresse et d’humanité. C’est fou ce que le pouvoir des mots peut apporter.


Ce roman est une leçon de vie. A travers ces échanges, les personnages vont se reconstruire, retrouver le sens de leurs vies, créer des liens d’amitié, se donner de l’amour et s’aider. Ces lettres, ils vont les attendre avec impatience. Ils vont prendre goût à poser des mots sur un papier, à être honnête envers les autres et eux-mêmes car c’est souvent plus facile de se confier quand il y a une feuille de papier entre notre interlocuteur et nous.


C’est un livre qui fait du bien, qui nous rend nostalgique des lettres envoyées à ses grands-parents, des cartes postales écrites pendant les vacances à ses copains d’école. C’est un livre qui nous contraint à se poser, à savourer chaque mot et à profiter du temps présent.


Les passages du livre qui m’ont touché :


« Samuel se moque des répétitions, Juliette a du mal avec les liaisons (à l’image des problèmes qu’elle rencontrait pour lier le passé au présent ?), Nicolas a son franc-parler (le même que dans la vie), Jeanne aime les interjections, Jean les adverbes. »


« Depuis un an et demi, il prend les choses comme elles viennent. Il n’a pas de prise sur elles, pas de projet, n’attend rien, espère peu. Il ne sent pas le droit de demander quoi que ce soit à qui que ce soit. Il aurait le sentiment de prend la place de cet autre qui le méritait bien plus que lui. »


« (…) on ne se confie pas de la même façon à l’oral et à l’écrit. Dans un mail, nous parons au plus pressé, ne nous préoccupons pas de style. Notre graphie dit aussi des choses de nous. Tout comme notre papier à lettres. Ce que je préfère dans la correspondance écrite, c’est que le temps prend son temps. Que la lettre voyage jusqu’à l’autre. »


« La boulangerie, c’est le lieu fédérateur par excellence, où se côtoient l’homme d’affaires et le chômeur, la wonder woman et la femme au foyer, où chacun passe tous les jours, ou presque. C’est là aussi qu’on envoie son enfant faire une course pour la première fois. Avec le bistrot, la boulangerie, c’est le cœur du village. »


« Tous autant que nous sommes, nous bâtissons notre vie d’adulte sur notre enfance. Elle est plus ou moins solide, stable, fiable, mais dit beaucoup de nos peurs, de nos incapacités, de nos enthousiasmes et du feu qui nous anime. »


« Pourquoi avons-nous peur de nous retrouver face à nous-mêmes ? Nous refusons d’être confrontés au vide, à l’inaction, aux questions sans réponse. Nous devons coûte que coûte avoir un projet. Je crois pourtant que cette « plongée dans le vide », comme nous l’écrivez, est un passage obligé, auquel certains d’entre nous ne peuvent échapper. Ils ne supportent plus d’être là où ils sont et ne connaissent pas encore l’endroit où ils veulent aller. »


« Oui. Mais attention, pour réussir, faudra te sortir les doigts du cul, ça ne tombera pas tout cru dans le bec. »


« J’adore cette ville, mais je ne veux plus y vivre. Il y a trop de sollicitations. Je n’arrive pas à canaliser mon énergie. Je suis pris dans un tourbillon. »


« J’ai compris que le premier piège de la vieillesse, c’est le renoncement. Nous sommes moins motivés, devenons plus craintifs, paresseux, nous abdiquons. Il suffit d’un rien. Nous nous recroquevillons, rentrons doucement mais sûrement dans notre coquille. Le mouvement est presque imperceptible, mais il est réel. »


« Si vous vous en donnez les moyens et si c’est ce que vous souhaitez, vous connaissez d’autres grandes satisfactions, d’autres mauvaises surprises aussi. On ne voudrait que les premières, mais elles ne vont pas sans les secondes. »


« A trop retourner dans le passé ou se projeter dans le futur, on risque de se casser la figure. Profitons du présent. »


Et vous, quel passage vous a parlé ?


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